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La gnose de Princeton : une synthse de lascience de la philosophie et de la religion
Autor(en): Gex, Maurice
Objekttyp: Article
Zeitschrift: Revue de thologie et de philosophie
Band (Jahr): 32 (1982)
Heft 4
Persistenter Link: http://dx.doi.org/10.5169/seals-381234
PDF erstellt am: 05.11.2015
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REVUE
DE
THOLOGIE
ET
DE
PHILOSOPHIE,
114
(1982).
P.
415-426
LA
GNOSE
DE
PRINCETON
UNE
SYNTHSE
DE
LA
SCIENCE,
DE
LA
PHILOSOPHIE ET
DE
LA
RELIGION
MAURICE
GEX
Les
rapports
de
la
science
et
de
la
philosophie
ont
connu
toutes sortes
de
vicissitudes,
tout
comme
les
mnages
des
humains.
Parfois
ces
rapports
furent
harmonieux
et
exprimaient
une entente
cordiale
qui
profitait
aux
deux
membres du
couple,
mais
trs
souvent
aussi,
ils furent
orageux
et
ponctus
par
des
apprciations
dvalorisantes
de
part
et
d autre,
si
ce
n est
par
des
injures
violentes.
La Gnose
de
Princeton
tente
une
rconciliation
de
la
science
et
de
la
philosophie,
et
cela
sans
nuire
la
spcificit
de
chacune
de
ces
disciplines.
Soulignons
ds
le
dbut
qu elle
ne
cherche
nullement
oprer
un
fcheux
rductionnisme
l gard
de
la
pense
philosophique,
ainsi
que
le
font
les
philosophies
dites
scientifiques,
telles
que
le
matrialisme
dialectique,
par
exemple.
Bref
historique
Depuis
1960
environ,
de
grands
savants amricains,
parmi
lesquels
des
prix
Nobel,
ont
prouv
le
besoin
de
franchir
les
limites
de
la
science
actuelle
pour
construire
une
philosophie
qui
ne
soit
ni
en
contradiction,
ni
indiffrente
ou
neutre
l gard
de
cette
science.
Ces
savants
se
recrutaient
surtout
parmi
les
physiciens
de
l universit
de
Princeton
o Einstein
avait
termin
sa
carrire
de
chercheur,
et
chez
les
astronomes
de
Pasadena,
fau
bourg
de
Los Angeles,
travaillant
sur
les
monts
Wilson
et
Palomar.
Ajou
tons
que
ces
dernires
annes
des
biologistes
se
sont
joints
aux
physiciens
et
aux
astronomes
qui
constituaient
le
premier
groupe.
L ouverture
vers
la
bio
logie,
science
dont
l objet
est
d une
extraordinaire
complexit,
est
sans
doute
salutaire
pour
quilibrer
les
tendances
trop
purement
mathmatiques
des
physiciens
et
astronomes.
Ces
savants
n ont
rien
publi
de
leurs ides,
notre
connaissance,
et
se
bornent
changer
entre
eux
des
communications
et
des
discussions
qui
ne
sont
pas
rendues
publiques.
Cependant,
pour
attnuer
ce
que
ce
silence
extrieur
peut
avoir
d inquitant
pour
les
esprits
pris
de
clart
et
d ouver
ture,
et
pour
enlever
leur
pense
un
relent
d occultisme,
les
nouveaux
gnostiques
ont
autoris
un
philosophe
franais
participer
leurs
runions
-
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416
MAURICE
GEX
et
publier
leurs
conceptions,
condition
qu aucun nom
propre
ne
soit
divulgu,
afin
de
prserver
leur
anonymat.
Ce
philosophe, Raymond
Ruyer,
a
construit
une uvre
importante
et
ses
nombreuses
publications
remontent
1930,
donc
ses
ides
personnelles
ont
pris
corps
bien
avant
que
les
no-gnostiques
commencent
leur
uvre
collec
tive.
Or,
chose
tonnante,
la Gnose s inscrit
harmonieusement
dans
la
pense
de
Ruyer
et
la
prolonge
certains
gards,
en
la
confortant,
ce
qui
tmoigne
d une
identit
de
longueur
d ondes
de
part
et
d autre,
si
nous
osons
risquer
cette
image
familire.
On
peut
donc dire
que
Ruyer
tait
un
pr-gnostique qui
s ignorait
jusqu l apparition
de
cette
spculation.
Ainsi,
la
Gnose
de
Princeton
se
trouve
expose
en
franais
seulement,
dans
les
trois
ouvrages que
nous
analysons.
La
meilleure
introduction
la Gnose
consiste
s initier
la
philosophie
de
Ruyer.
Il
ne
nous
est
pas
possible
de
fournir,
en
guise
d introduction, un
expos
de la
pense complexe
et
subtile
du
philosophe
franais,
faute
de
place
dans
ce
trop
bref
compte
rendu.
Mais
heureusement
Andr
Voelke
a
publi
dans
cette
revue
une
excellente
tude
dont
nous
recommandons
la
lecture,
intitule
Les
thmes
fondamentaux
de
la
mtaphysique
de
Ray
mond
Ruyer1.
Naturellement, Ruyer
a
publi
des
ouvrages
importants
depuis
cette
date,
mais
l article
de
Voelke
contient
les ides
fondamentales
du
philosophe, qui
n a
jamais
dvi
de
sa route.
La
Gnose
historique
et
la
Nouvelle
Gnose
La
thse
fondamentale
de
la
Nouvelle
Gnose est
celle
de
toute
Gnose.
Le
monde
est
domin
par
l Esprit,
fait
par
l Esprit,
ou
par
des
Esprits
dl
gus.
L Esprit
trouve
(ou
plutt
se
cre
lui-mme) une
rsistance,
une
oppo
sition:
la
Matire.
L homme
par
la
science,
mais
par
une
science
suprieure,
transpose
ou
spiritualise,
peut
accder
l Esprit
cosmique et,
s il
est
sage
en
mme
temps
qu intelligent,
y
trouver
le
Salut
(G.P.,
p.
33).
Aprs
avoir
soulign
les
similitudes
qui
relient
l ancienne
Gnose
la
nouvelle,
prcisons
les
diffrences
qui
sont
considrables.
La
Gnose
historique,
ne
en
Mditerrane orientale
au
premier
sicle
de
notre
re,
tait
une
religion
qui procurait
le
salut
par
la
connaissance
et
non
par
les
uvres
ou
par
la
foi.
Il
s agissait
d une
connaissance
de
la
ralit
suprasensible
obtenue
par
l extase,
transmise
aux
initis,
et
qui
contenait
l explication
de
toute
chose.
Les
Gnostiques
furent
foncirement
pessi
mistes,
pour
eux
la
matire
est
le
mal,
le
bourbier
dans
lequel
l me
humaine
est
emprisonne.
La
connaissance
religieuse suprieure
doit
librer
l me
de
ses
attaches
corporelles
et
lui
permettre
de
rejoindre
la
divinit
il
s agit
d une
conversion
toute
imprgne
de
no-platonisme.
1
I956-I,
p.
1-27.
-
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LA GNOSE
DE
PRINCETON
417
La
Gnose
de
Princeton n est
pas
pessimiste
comme
celle
de
l antiquit.
Elle
refuse
le
dualisme
esprit-matire,
me-corps
de
la
Gnose
historique,
car
pour
elle la
matire
n a
pas
d existence
relle,
elle
n est
qu une
apparence.
Pourquoi
alors
les
savants
amricains
ont-ils
qualifi
de
gnose
leurs
recherches
philosophico-religieuses?
Ils
l ont
fait
par
dfi. Les
savants
stric
tement
positivistes
les
ont
tourns
en
drision
en
les
qualifiant
tour
tour
de
cosmoltres,
de
palomariens,
de
thosophes,
enfin
de
gnosti
ques.
Par
bravade,
ils
ont
adopt
cette
dernire
qualification
de
leurs
contempteurs,
s en
faisant
une
sorte
de
bannire
glorieuse.
D ailleurs,
comme
nous
le
verrons,
nos
modernes
gnostiques
superposent
la connais
sance
scientifique
une
connaissance
de
la
ralit
authentique
tout
comme
les
anciens le
faisaient
par
rapport
au
monde
sensible,
ce
qui
peut
justifier
dans une
certaine
mesure
l appellation
commune.
Il
est
oiseux de
rechercher
des
ressemblances
plus
pousses
entre
les
deux
Gnoses,
les
no-gnostiques ne
se
soucient
nullement
de
considrations
historiques.
Dveloppons
donc
la Gnose
amricaine
pour
elle-mme,
sans
retour
en
arrire.
L endroit
et
l envers
de
la
tapisserie-univers
La
Gnose
pourrait
tre dfinie
comme
philosophie
de
la
Lumire
consciente
(G.P.,
p.
77).
La
Nouvelle
Gnose
n est
qu une transposition,
une
inversion fidle
de
la
science.
Le
cosmos
est
une
tapisserie
que
la science dcrit
fidlement,
mais
l envers.
La
Gnose
consiste,
au-del
ou
travers
les
observables
de
la
science,
connatre
la
vie
propre
des
tres. En
quoi
elle
est
connaissance
proprement
dite
(Gnosis)
et
non
simplement
prparation
de
connaissance,
comme
la science
(G.P.,
p.
38).
La
Gnose
dfend
un
panpsychisme
radical,
mais
vite,
comme
nous
le
verrons,
l idalisme
philosophique.
Pour
pntrer
vraiment
au cur
de la nouvelle
Gnose,
il
convient
de
dpasser
l image,
sans
doute
trs
frappante
mais
peu
technique,
d une
tapis
serie
dont
la
science
ne
nous
livre
que
l envers
et
dont
l investigation
philo-
sophico-religieuse
doit dcouvrir
l endroit.
Toute
mtaphysique
a
sa
racine,
croyons-nous,
dans
une
thorie
de
la
connaissance,
implicite
ou explicite.
Pour
le
marxisme,
il
n y
a
que
deux
types
de
philosophie
possibles:
l idalisme
de
Berkeley
et
Mach,
et
le
ra
lisme
selon
Engels, Marx,
Lnine,
c est--dire
le
matrialisme
dialectique.
Si
on
refuse le
matrialisme,
on
tombe
dans
l idalisme
abhorr,
et
si
on
devient
conscient
des
erreurs
de
l idalisme,
on
est
logiquement
contraint
d pouser
le matrialisme
Or
les
gnostiques refusent
l idalisme,
philososphie
triomphante
avant
la
dernire
guerre,
tout
comme
le
font
les
matrialistes.
Tous
deux,
matria-
-
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418
MAURICE
GEX
listes
et
gnostiques,
sont
des
ralistes
monistes2.
Pour
les
premiers,
tout
est
en
son
fond
matire
inerte
et
aveugle,
pour
les
seconds,
il
n y
a
que
des ra
lits
vivantes
et
psychiques.
L esprit
apparat
un
certain
moment
de
l volution,
par
complexit
croissante,
pour
les
matrialistes.
L esprit
se
manifeste
ds
le
dbut
de
l vo
lution
selon
les
gnostiques.
L erreur
est
de
s imaginer
que
la
slection
naturelle
dispense
de
toute
intervention
de
la
conscience
(G.P.,
p.
104).
L invention
biologique,
comme
l invention
esthtique,
scientifique,
comme
l exploration
gographique,
est
un mlange
de
chances
et
d adresse,
d astuce
et
d heureux
hasard... Sans
adresse,
le
hasard
ne
peut
rien.
Sans
informateur
conscient,
les
machines
information
ne
sont
rien
(G.P.,
p.
107).
La
matire
ne
peut
subsister
par
elle-mme,
indpendamment
de
tout
connaisseur,
que
si
elle n est
pas
chose,
objet
l tat
pur,
mais
peut
se
possder
elle-mme, en
sa
forme
et
son
comportement
actif
(G.P.,
p.
67).
Ce
que
l on
nomme
matire
n tant
plus
considr
comme
chose
inerte
aprs
les
travaux
des
physiciens
modernes
qui
montrent
une
prodigieuse
diversit
de
mouvements
rapides
et
coordonns
au
sein
de
toute
matire
elle rvle ainsi
son
intriorit,
son psychisme,
le
mot
tant
pris
dans
un
sens
trs
large:
se possder
soi-mme
est
la
marque
d une
intriorit,
d un
psychisme,
donc
nous
aboutissons
un
panpsychisme.
Le
ralisme matrialiste
est
rejeter,
car
il est contradictoire:
Les
Gnostiques refusent
de
croire
que
l Univers
soit un
Aveugle
absolu,
ou un
bton
d aveugle
menant
un
aveugle
d abord
inconscient
et
qui ne va
nulle
part,
jusqu
le
faire
devenir
miraculeusement
une
Conscience
qui
se met
vouloir
aller
quelque
part
(G.P.,
p.
109).
Il
est
certain
surtout
que
le
cosmos
n est
pas
une
assemble
de
corps
aveugles,
se
cognant
et s accro-
chant
au
hasard dans
le
vide
et
la
nuit
(P.S.,
p.
290).
Le
ralisme
tant
adopt,
le
matrialisme
rfut,
il
ne
reste
que
le
pan-
psychisme
leibnizien
comme
solution
valable.
L illusion
matrialiste
Si
la
matire
n existe
pas,
ou
plutt
si
elle
n est
qu une
apparence,
la
manifestation
de
cette
apparence
doit
tre
explique.
Un observateur
connat
un
tre
comme
un
corps
matriel,
c est--dire
qu il
n en connat
que
l envers,
alors
que
cet
tre
pour
lui-mme
se
connat
par
son
endroit.
Rciproquement,
si
cet
tre
est
lui-mme
observateur,
il
ne
2
Nous
ne
parlons
pas
ici
du
ralisme
platonicien qui
s oppose
au
nominalisme
dans
la
querelle
des
Universaux.
Le
ralisme
dont
il
est
question
s oppose
l ida
lisme
et
admet
que
le
rel
peut
se
soutenir
lui-mme,
se
possder
lui-mme,
ind
pendamment
de
la
connaissance
qu on
en
prend.
-
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6/13
LA
GNOSE
DE
PRINCETON
419
saisira
que
le
corps
du
premier
observateur,
son
endroit lui
chappera.
Les
tres
ne
se
voient
entre
eux
que
comme
corps,
telle
est
l explication
de
la
matire-apparence.
La
matire
s organise
elle-mme,
ce
qui
rvle
qu elle
possde
un
endroit,
lequel
chappe
l observateur.
Ce
qui
fait
la
vraisemblance
du
matrialisme,
c est
que
la
plupart
des
tres
perus
et
connus
sont,
en
effet,
de
faux
tres,
des
composs,
des
agen
cements
artificiels
ou
fortuits.
Un
nuage,
une
rivire,
une
maison,
une
machine
n ont
videmment
pas.
comme
tels, d endroit
conscient.
Leurs
molcules
composantes,
par
contre,
puisqu elles
subsistent
par
elles-mmes,
gardent
leur
forme,
la
reconstituent
ventuellement,
il
faut
bien
qu elles
aient
un
endroit
qui
en
fait
une
ralit
indpendante
de
notre
vision
ou
de
nos
soins.
[Ce
sont
de
vrais
tres.]
Les
normes
amas
de
matire
des
toiles
et
des
nbuleuses
sont
de la
conscience
l tat
pulvrulent,
une
sorte
de
neige
de
conscience,
neige
faite
de
milliards
de
cristaux
de
glace
et
rendue
visible,
alors
que
la
glace
[la
conscience]
est
transparente
(G.P.,
p.
35).
Ce
qu on nomme
l effet
de
foule,
dans
un
ensemble,
masque
la
nature
spirituelle
des
lments
com
posants.
Si
la
spiritualit
de
la
matire,
postule
par
la
Gnose,
a
chapp
aux
investigations
scientifiques,
cela
tient
au
fait
que
la
trame
de
l envers
se
ferme
sur
elle-mme
sans
lacunes,
sans
solution
de
continuit,
aussi
peut-on
prospecter
l univers
scientifiquement
sans
jamais
se
douter
qu il
comporte
un
endroit
qui
a t
nglig.
Tout
se
passe
comme
si
l endroit
impliquait
pour
sa
dcouverte
une
nouvelle
dimension:
la
dimension
gnostique.
L homme
lment du
cosmos
Une
consquence
morale
trs
importante
du
panpsychisme
des
Nou
veaux
Gnostiques
est
l homme
enchss
dans
le rseau
des
forces univer
selles.
L Homme
n est
pas
un
tranger
dans
l Univers,
mais
l essence
mme
de
la
ralit
(Alain
de
Benoist).
Connatre
l homme,
c est
connatre
l univers,
proclame
un
adage hermtique.
La
philosophie
occulte
de
tous
les
temps
s est
appuye sur
une
troite
correspondance
entre
le
microcosme
(l homme)
et
le
macrocosme
(l univers).
Spinoza
a
crit,
il
y
a
trois
cents
ans,
que
l homme
dans la
nature
n est
pas
comme
un
empire
dans
un
autre
empire
(Ethique,
III,
prface).
Nous
sommes
loin
de
l homme
passion
inutile
selon
Sartre,
philosophe
totalement
dpourvu
d esprit
cosmique.
Pour
bien
souligner
que
nous
sommes
solidaires
de
tout
l univers,
Ruyer
prcise
notre
filiation.
Vous
et
moi,
nous
sommes
sortis
des
cieux toiles.
Ils
nous
ont
fait
de
leur
substance.
Nous
tions
contenus
en
germes
dans
cette
poussire
stellaire
qui
n tait
donc
pas
une
poussire ou une
neige
matrielles,
puisque
notre
regard
conscient
est
sorti
lentement
de
cette
neige
-
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7/13
420
MAURICE
GEX
apparemment
sans
regard
(T.C,
p.
8).
La
lumire
des
toiles
est
de
l me
condense
(T.C,
p.
15).
Le vertical
et
l horizontal
Les
gnostiques
formulent
une
double
orientation
que
l on
peut
appliquer
la
pense
et
au
rel
que
vise
cette
pense.
L Horizontal,
c est
tout
le
monde
dit
rel,
tout
ce
qui
se
trouve
dans
l espace
et
dans
le
temps.
Le
Vertical,
c est
tout
ce
qui
est
au-del,
en
dehors
de
l espace-temps;
c est
le
monde
de
l esprit qui
anime
le
monde
spatio-temporel.
Prcisons
que
les
termes
horizontal
et
vertical
n ont
pas
de
signifi
cation gomtrique
ou
gographique:
il
faut
les
prendre
exclusivement
dans
un
sens
symbolique.
Le
mystique,
qui
cherche
une
communication
avec
l esprit,
est
reli
au
monde
vertical. L homme
d affaires ou
d action
courant
le
monde
et
cher
chant
des
aventures
profitables,
conomiques
ou
politiques,
est
vou
au
monde
horizontal.
Le
caractre extraverti
est
associ
l horizontalit,
le
caractre
introverti
est
soucieux
de
verticalit.
La
vie
est
toujours
la fois
verticale
et
horizontale,
mais la
proportion
entre
ces
deux
lments
dtermine
le
plus
souvent
une
dominante
verticale
ou
horizontale
chez
l individu.
Le
Vertical
des
Gnostiques
n est
pas
un
repli
sur
soi,
c est
l exploration
avec
foi
du
monde
invisible
(T.C,
p.
33).
Il
est clair
que
les
Gnostiques
recommandent
qu on
ne
nglige
pas
pour
son
bonheur et
celui
des
autres
la
dimension
verticale,
car l esprance
est
verticale,
elle
engendre
une
irisation
psychique
fort
capable
de
com
battre
l angoisse.
Celle-ci
provient
du
vide
que
cre
une
existence
purement
horizontale.
La
diffrenciation
prcise,
mticuleuse,
tatillonne,
qui
s attache
surtout
ce
qui
distingue
une
chose
d une
autre,
maintient
la vie
dans
l horizontalit
en
crant
l efficacit
technique.
L originalit
de
la
psycho
logie gnostique,
c est
de
considrer
que
la
diffrenciation
n est
bnfique
que
pour
l adaptation
la
vie
pratique.
Elle
reprsente
au
contraire
une
perte,
une
chute,
pour
l adaptation...
verticale,
aux
essences
des
choses-
Toute
diffrenciation
est
restrictive
et diminutive
(T.C,
p.
54).
L opposition
essentialisme-existentialisme
rejoint
et
prcise
celle du
ver
tical
et
de
l horizontal.
Nous
percevons
le
gnral,
l essentiel,
avant
de
prciser
les
existants
particuliers...
Nous
sommes
tous
spontanment
essen-
tialistes,
avant
de
devenir soit
utilitaristes
et
plats,
soit
existentialistes
et
anxieux
(T.C,
p.
53).
Les
Gnostiques
rejoignent
ainsi le ralisme de Platon
en
recommandant
de
croire
aux
ralits ternelles
(T.C,
p.
369).
C est
la
vrit
du
monde
ternel
qui
est
curative,
non
la
vrit
de
mon
histoire
(T.C,
p.
194).
-
7/24/2019 rtp-003_1982_32_4_a_007_d (1)
8/13
LA
GNOSE
DE
PRINCETON
421
Le
divin
Nous
sommes
ainsi
introduits
au
problme
religieux,
qui
est
la
recherche
d une
connexion
entre
le
transcendant,
le
vertical
et
le
monde
de
l espace
et
du
temps,
l horizontal.
Selon la
thse
fondamentale
de
la
Nouvelle
Gnose,
le
monde
est,
comme
nous
l avons
dj
dit
au
dbut,
domin
par
l Esprit,
ce
qui
implique
une
Source,
une
Vrit,
un
Ordre
universel
que
nos
Gnostiques nomment
la
Grande Conscience.
Il
s agit
d un
autre terme
pour
dsigner
la
divinit.
Pour
eux,
Dieu
est
dans
le
Cosmos,
dans
chaque
tre
et
dans
Tunit
des
tres,
ce
qui
nous
conduit
au
panthisme.
La
Grande
Conscience
est
impersonnelle.
La
Gnose
tourne
le
dos
au
christianisme
et
c est
vers
l Orient
qu il
faut
lui
chercher
une
inspiration religieuse
semblable.
Les
nouveaux Gnostiques
n aiment
pas
se
rfrer
aux
sagesses
orien
tales,
chinoise
ou
hindoue. Ils
estiment
que
l Occident,
en
sa
sagesse
comme
en sa
science,
peut
rester
occidental
(T.C,
p.
11).
Or,
comme nous
allons
le
voir,
la Gnose
rejoint,
sans
l avoir
cherch,
les
philosophies
religieuses
de
l Orient.
Carl
Keller,
professeur
la
Facult
de
thologie
de
Lausanne, a
crit:
Ce
n est
pas
du
tout
du
ct
du
gnosticisme
historique qu il
faut
chercher
des
antcdents
et
des
parallles,
mais du
ct
de
Y
Inde
ou,
la
rigueur,
de
Plotin et
des
philosophies
occidentales
qui
sont
issues
de
lui3.
Il
a
brillam
ment
montr
les
similitudes
profondes
qui
existent
entre
la
Nouvelle
Gnose
et
l hindouisme
de
Rmnuja4.
L inspiration profonde
de
la Gnose
amricaine
est
de
proposer
une
vision
cosmocentrique
et
thocentrique
du monde.
Elle
ne prend
pas
l homme
comme
centre,
mais
bien
le
Cosmos
et
Dieu, qui
se
confond
d ail
leurs
avec
le
Cosmos.
Leurs
conceptions
sur
la
mort souligne
encore
davantage
leurs
ten
dances
orientales
communes.
3
Les
cahiers
protestants,
sept.
1977.
n
4,
p.
22.
4
Rmnuja
(10507-1137)
a
bti
sa
pense
en
combattant
le
hautain
monisme
absolu,
ou
non-dualisme,
de
ankara
pour
lequel
le
monde
extrieur
ainsi
que
le
moi
sont
le
produit
d une
illusion
(My).
La Conscience
universelle
de
ankara,
une,
indivise,
homogne,
infinie
et ternelle,
est
indiffrencie,
alors
que pour
Rmnuja
cette
Conscience
est
diffrencie
et
structure
comme
pour
les
Gnostiques.
Il
y
a
trois
sortes
de
ralits
distinctes
les
unes
des
autres:
le
monde
matriel,
le monde
des
mes
individuelles
et
la
Conscience
suprme
(Brahman).
Sur
ce
point
on rejoint
le
profond
ralisme
de
la
Gnose.
La
pense
occidentale se
sent
beaucoup
plus
l aise
avec
une
telle
philosophie qu avec
celle
qui
professe
l universelle
illusion,
le
royaume
de
My.
L univers
des
phnomnes
existe
rellement,
mais
il
n est
pas
indpendant
de
la
Grande
Conscience:
il
participe
de
celle-ci,
il
est
comme
le
corps
de
la
divinit.
A d autres
points
de vue,
la
pense
de
Rmnuja
et
celle
de
la Gnose
diffrent
l une
de
l autre,
mais
il
ne
nous
est
pas
possible
d insister
l-dessus:
nous
renvoyons
l article
de
C.
Keller.
-
7/24/2019 rtp-003_1982_32_4_a_007_d (1)
9/13
422
MAURICE
GEX
L me
individuelle
ne
peut
subsister telle
quelle
la
mort,
avec
ses
cha
faudages
de
mmoires
sociales
et
individuelles.
Au-del
des
mythes
de
la
survie
et
de
l immortalit
individuelle,
il
y
a
le
mythe
vrai
de
l Esprit
divin.
Pour
les
No-Gnostiques,
tous
les
tres
individualiss
et
temporaliss
ne
sont
que
des
Ides
divines,
qui
une
certaine
autonomie est
permise
provisoirement.
Les
consciences
individualises
sont
ainsi
une
sorte
d inconscient
divin,
de
rve
de
Brahma...
Ainsi,
en
ce
sens,
mourir,
ce
n est
pas
retourner
au
nant,
c est redevenir
le
Dieu
unique
(G.P.,
p.
287-288).
Il
y
a
anantissement
des
individualits
en
Dieu
(G.P.,
p.
292).
La
conqute
de
l espace
et
celle
du
temps
Nous
ne
voulons
pas
nous
lancer
dans
l examen
des
hypothses
hardies
et
parfois
contestables
des
Gnostiques au
sujet
des
cent
prochains
sicles,
mais
nous
nous
proposons
de
dgager
les
ides
directrices
de
cet
ouvrage.
Selon la
relativit
d Einstein,
ni
le
temps
ni
l espace
ne
sont
des
donnes
objectives
pris sparment.
D aprs
le
systme
de
rfrence
choisi,
les
dures
et
les
distances
qui
sparent
deux
vnements
ne
sont
pas
les
mmes.
Pour
obtenir
une
valeur
invariante
sparant
ces
deux
phnomnes,
et
cela
quel
que
soit
le
systme
de
rfrence
auquel
on
les
rapporte,
il
faut,
selon
Minkovski,
construire
un
mixte
d espace
et
de
temps,
1 intervalle,
relatif
un
continuum
quatre
dimensions,
l une
d elles
tant
le
temps
qui
joue
ainsi
un
rle
analogue
une
dimension
de
l espace.
L espace
et
le
temps
considrs
en
eux-mmes
doivent
disparatre comme
des
fantmes
et
seul
un
mode
d union
de
l espace
et
du
temps
peut
possder
une
individualit
(Minkovski).
Contrairement
aux
partisans
d Einstein,
nos
Gnostiques
tablissent
une
profonde
coupure,
une
vritable
sparation
entre
temps
et
espace
en
se
pla
ant
au
point
de
vue
de
leur
conqute.
Ce
point
de
vue
est
sans
doute
plus
humain,
plus proche
de
l exprience
de
chacun
que
la
recherche
d une
quation mettant
en
vidence
un
invariant.
Conqute
du
temps
et
conqute
de
l espace:
deux
domaines
tout
fait
diffrents
et
disparates,
aussi
difficiles
mlanger
que
l eau
et l huile
(P.S.,
p.
9).
Les
astronautes,
pour
conqurir
l espace autour
de
la
terre,
plantes
et
satellites,
ont
besoin
d une
prparation
d ingnieurs,
de
techniciens,
experts
en
mcanique
cleste.
L espace
(et
le
prsent)
appartiennent
l homme
civilis,
ses
calculs,
ses
entreprises,
techniciennes
et
rationnelles.
Le
temps
appartient
Dieu,
ses
desseins
inconnus
ou
que
nous
ne
connaissons
qu
l envers
et
aprs
coup...
A
Dieu,
ou
ce
qui,
dans
l homme,
est
surhumain,
ou
sur-indi
viduel,
l instinctif,
au
transrationnel
(P.S.,
p.
221).
-
7/24/2019 rtp-003_1982_32_4_a_007_d (1)
10/13
LA GNOSE
DE
PRINCETON
423
Le
temps
est surrationnel
en ce
sens
qu il
est
invention
thmatique
de
structures...
Pour
sa
conqute,
il
faut
sacrifier
l intelligence calculatrice,
peut-tre
l intelligence
scientifique,
et dcouvrir
une
intelligence
vitale
(P.S.,
p.
21, 24).
Esprit ample
et
faible
oppos
esprit
fort
et
troit
Il
est
regrettable
que
cette
intelligence
vitale
ne
soit
pas
davantage pr
cise,
car
lorsque
Ruyer
dclare
qu elle
ressemble
terriblement
la
btise,
on
peut
souponner que
l auteur
sacrifie
une
violente
dman
geaison
d humour
Qu on
nous
permette
une suggestion
personnelle.
Ne
faudrait-il
pas
chercher
nous
reprsenter
cette
intelligence
vitale
en
s inspirant
de
la
deuxime
pense
de Pascal
(d.
Brunschvicg)
qui
classe
les
esprits
en
deux
types:
l esprit
pouvant
tre
fort
et
troit,
et
pouvant
tre
aussi
ample
et faible.
Cette
classification
nous parat
beaucoup
plus
pro
fonde
et riche
en
consquences
que
celle
dont
on
nous
rabat
les
oreilles:
esprit
de
gomtrie
et
esprit
de finesse
(premire
pense,
d.
Brunschvicg)5.
Descartes
est
le
type
parfait
de
l esprit
profond
et
troit,
lui
qui
craignait
toujours
d oublier
quelque
chose
dans
une
enumeration
(quatrime
rgle
du
Discours
de
la
mthode),
et
qui
vante
ces
longues
chanes
de
raisons,
toutes
simples
et
faciles,
dont
les
gomtres
[=
mathmaticiens
en
gnral]
ont
coutume
de
se
servir
pour
parvenir
leurs
plus
difficiles
dmonstra
tions.
Si
l esprit
de
Descartes
semble
hanter
toute
la
philosophie
franaise,
la
facult
imaginative
de
Bacon,
son
got
du
concret
et
du
pratique,
son
igno
rance
et
son
mpris
de
l abstraction
et
de
la
dduction,
semblent
avoir
pass
dans
le
sang
qui
fait vivre la
philosophie
anglaise6.
L intelligence
vitale selon
les
Gnostiques
nous
parat
relever
de la
pense
ample
mais
faible
qui
se
rapporte
un
nombre
considrable
d l
ments,
trop
nombreux
pour
tre
tous
distinctement
perus
mais
qui
sont
en
5
La
comparaison
des
deux
penses
rvle
une
contradiction
apparente
sur
laquelle
Brunschvicg
lui-mme a
but.
Dans
la
pense n
1,
l esprit
de finesse
s oppose
l esprit
de
gomtrie,
alors
que
dans la
deuxime
pense,
c est
l esprit
de
gomtrie,
qui
peut
saisir
un grand
nombre
de
principes
sans
les
confondre,
et
qui
possde
donc
l esprit
de finesse.
La
solution,
dveloppe
par
Franois Mentre,
Espces
et
varits
d intelligences,
Paris
1920,
p.
63-79,
est
la suivante:
Dans
la
pense
n
1,
l esprit
de
gomtrie
signifie l esprit
mathmatique
en
gnral.
Dans
la
pense
n
2,
l esprit
de
gomtrie
se
rapporte
l esprit
du mathmati
cien
synthtique, qui prfre
rsoudre
un problme
au
moyen
de
la
gomtrie,
et
cela
par
opposition
l analyste
qui
choisit
les mthodes
algbriques.
L oppostion
dans
la
pense
n
2
joue
ainsi
entre
mathmaticiens
de
types
diffrents.
6
Pierre
Duhem,
La
thorie
de
la
physique,
2e
d.,
Paris
1914,
p.
95.
-
7/24/2019 rtp-003_1982_32_4_a_007_d (1)
11/13
424
MAURICE
GEX
quelque
sorte sentis,
happs
par
intuition
pour
tre insrs
dans
une
syn
thse
quelque
peu
confuse,
qui
met
en
droute
l esprit analytique.
Nous
nous
bornons
ici
une
simple
suggestion,
un appel
d approfon
dissement,
mais,
de
toute manire,
la
notion d intelligence
vitale
barre
la
route
au
rductionnisme.
Nette
orientation
du
caractre
gnostique
Il
serait fastidieux
de
dtailler
l art
de
vivre
selon
les
Gnostiques.
Cher
chons
plutt
dgager
la
dominante
de
leur
caractre.
Ils
affirment
vigoureusement
les
valeurs
de
continuit,
de
persvrance,
de
stabilit,
de
tradition,
de
dure
et
donnent
de
l importance
la
norme,
la
loi,
comme
condition
de
permanence
et
de
dure,
ainsi
que
le
font
les
flegmatiques
(P.S.,
p.
23).
Ils
sont
anti-hippies,
pourrait-on
dire. Selon
l ouvrage
de
Ruyer,
Les
cent
prochains
sicles
,
ils
prnent
les
peuples
long-vivants, comme
les
Chinois.
Par la
volont
de
durer,
les
peuples parti
cipent
la Grande Conscience
et
sont
en
accord
avec
elle
(P.S.,
p.
321).
Nous
savons
dj
que
l essentialisme,
permettant
d prouver
la
ralit
de la
transcendance,
doit
limiter
un
existentialisme
trop
exclusif
qui
resterait
pri
sonnier
de
la
technicit et
inciterait
au
rductionnisme.
Prendre
le
parti
de
l essentialisme
contre
l existentialisme
exclusif,
c est valoriser
le
permanent
contre
l instabilit
du
devenir.
Sur le
plan
humain,
dans
la
clbre
querelle
de
la
nature
et
de
la
nurture
,
c est
prendre
parti
pour
l hrdit
que
ngligent
fcheusement
les
psychanalistes
dans
leurs
mthodes
d investiga
tion
de
l inconscient
car
la
meilleure
ducation
ne
peut
changer
les
gnes,...
elle
ne
peut
donner
des
dons:
la
bonne ducation
est
un
rv
lateur
de
la
bonne
hrdit
(P.S.,
p.
88-89).
Les
Gnostiques
se
veulent,
selon
la
typologie
de
la
caractrologie
des
peuples
de
Paul
Griger7,
des
perptuants,
c est--dire
des
non-motifs
secondaires,
et
non
pas
des
fluctuants,
motifs
primaires.
Traduisons
approximativement
ces
diffrences dans
le
langage
de
Jung: nous avons vu
que
les
Gnostiques
doivent
faire
une
place
aux
tendances
introverties
de
verticalit,
s ils veulent
raliser
un quilibre
intrieur,
nourri
d esprance.
Survol
final
La Gnose
est
une
philosophie
cosmique,
elle n est
pas
axe
sur
l homme
mais
sur
le
Cosmos
conu
comme
une
totalit
enveloppante.
C est,
notre
sens,
la
plus
importante
des
orientations.
Remarquons
que
les
occultismes
ont
la
mme
orientation,
la
fois
cosmique
et
organique.
Cette dernire
ne
7
Paul
Griger,
La
caractrologie
ethnique,
approche
et
comprhension
des
peu
ples,
Paris
1961.
-
7/24/2019 rtp-003_1982_32_4_a_007_d (1)
12/13
LA GNOSE
DE
PRINCETON
425
se
laisse
pas
rduire
des
formes
logiques
abruptes,
des
dductions
linaires,
un
quelconque
mcanisme,
mais
reste
enveloppe
dans le
monde
des
influences
rciproques,
des
communications
caches
que
l uni
verselle
analogie
et
le
monde
des
correspondances
essaient
d exprimer
sans
parvenir
la
pleine
lumire
rationnelle.
La
Gnose,
si
elle vise le
cosmique
et
l organique
comme
les
occultismes,
veut
se
dgager
de
toutes
formulations
occultes
et
rester
en
plein
accord
avec
la science
moderne.
Un
organisme
selon
Arthur Koestler
qui
est
un gnostique
europen
est
une
hirarchie
stratifie
plusieurs
niveaux8.
En
passant
d un
niveau
l autre,
il
y
a
manque
de
prcision
et
de
clart.
Par
contre,
sur
un
mme
niveau,
tout
est clair
et
limpide.
Le
vague
est vertical
et
la
prcision
horizontale
(G.
P.,
p.
54).
Il
y
a
deux
manires d tre
inform,
par
observation
et
par
participation
des
thmes
transspatiaux,
au
monde
des
valeurs.
La
science
mconnat
les
participables
parce
qu ils
ne
sont
pas
dans
l espace,
ce
qui
limite
la
porte
de
la
connaissance
scientifique
(G.P.,
p.
123).
Dieu
est
un
Participable
plutt
qu un
Observable.
L exprience
de
la
participation
est
une
sorte
de
rvlation
naturelle
valeur
religieuse
(G.P.,
p.
129).
Ce
platonisme
est
peut-tre
la
cl de
toute
la
philosophie
des
Gnostiques.
Sur
le
terrain
de
la
connaissance la
Gnose
est
dualiste:
observable-participable,
envers-endroit,
phnomne-noumne
en langage
kantien.
Les choses
ne
sont
pas
ce
qu elles
paraissent.
Mais
en
mtaphysique,
la
Gnose
est
un
monisme
rigoureux
pour
lequel toute
ralit
est
spirituelle
et
qui
refuse
le
dualisme. Elle
n oppose
pas:
l esprit
la
matire,
le
subjectif
l objectif,
la
conscience
la
chose,
la science
la
religion.
En
rsum,
l univers
est
pntr
de
sens,
de
signification,
de
valeurs
smantiques.
L explication
scientifique
qui
s attache
des
mcanismes
n est
jamais
l explication
ultime.
La
science ne
saisit
que
le
phnomne
et
la
Gnose
veut
atteindre
l tre
des
choses,
l endroit
de la
tapisserie
cosmique.
Nous
sommes
en
prsence
d un
ralisme
panpsychique
d inspiration
leibni
zienne,
orient
vers
une
philosophie
de
l organisme.
Une
uvre
collective
ne
saurait
avoir
des
contours
nets,
cependant
la
Gnose
rsulte
d un
ensemble
d orientations,
de
vises
de
valeurs
prcises
et
cohrentes,
qui
suffisent
pour
la
caractriser
globalement
et
sans quivoque.
s
Janus,
Paris
1979,
p.
39.
-
7/24/2019 rtp-003_1982_32_4_a_007_d (1)
13/13
426
MAURICE
GEX
Elle
offre
une
vision
en
plein dveloppement
qui
se
prcise
de
plus
en
plus:
il
convient
donc
de
ne
pas
la
figer
dogmatiquement
dans
certaines
de
ses
affirmations
actuelles,
mais
de
suivre
sa
croissance
avec
une
sympathie
spirituelle
active.
BIBLIOGRAPHIE
Raymond
Ruyer:
La
Gnose de
Princeton.
Des
savants
la
recherche d une
religion,
Paris,
Fayard,
1974
(G.P.).
(Rdite en
livre
de
poche:
J ai
lu.)
Raymond
Ruyer:
Les
cent
prochains
sicles.
Le
destin
historique
de
l homme
selon la
Nouvelle Gnose
amricaine,
Paris,
Fayard,
1977
(P.S.).
Raymond
Ruyer:
L art
d tre
toujours
content.
Introduction
la
vie
gnostique,
Paris,
Fayard,
1978
(T.C).